1Si Victor Hugo rend hommage aux marins » et capitaines qui sont partis joyeux pour des courses lointaines » et qui dans ce morne horizon se sont Ă©vanouis » Oceano nox, il dresse Ă©galement un portrait moins romantique du Breton, ce sauvage grave et singulier [âŠ] parlant une langue morte, ce qui est faire habiter une tombe Ă sa pensĂ©e [âŠ] pĂȘcheur sur la cĂŽte, braconnier dans le hallier, aimant ses rois, ses seigneurs, ses prĂȘtres, ses poux ; pensif immobile souvent des heures entiĂšres sur la grande grĂšve dĂ©serte, sombre Ă©couteur de la mer.» Quatre-vingt-treize !. Câest dans cette langue morte » quâont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es les longues collectes dans une optique avant tout lexicographique dont nous livrons ici une brĂšve synthĂšse descriptive portant sur ces mĂ©tiers de la mer qui permettaient Ă lâhumanitĂ© qui vit lĂ , dans de sordides taudis, imprĂ©gnĂ©s de lâodeur des saumures et des pourritures de poisson, chĂ©tive et douloureuse » de vivre. Câest auprĂšs de ces hommes pĂąles et rabougris », de ces femmes spectrales dâune lividitĂ© de cire », de ces dos voĂ»tĂ©s », de ces ambulants cadavres », de ces visages blancs et fripĂ©s aux hagardes prunelles oĂč brille lâĂ©clat vitreux des fiĂšvres » Octave Mirbeau que nous avons recueilli ces tĂ©moignages dâun quotidien de labeur. Câest aussi en cette atmosphĂšre de cimetiĂšre, en cette irrespirable nature » que nous avons passĂ© jeunesse et appris cette langue morte » ... 2Douarnenez, Ă la pointe de la Bretagne, a longtemps Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme lâun des grands ports sardiniers de France. En 1837 la ville compte plus de 150 presses pour la prĂ©paration de la sardine qui devaient rapidement se transformer en usines spĂ©cialisĂ©es dans la fabrication de conserves, sardines et maquereaux principalement, changeant ainsi toute l'Ă©conomie du littoral. Les usines au nombre de 10 en 1870, de 24 dix ans plus tard atteindront le chiffre de 30 au dĂ©but du 20Ăšme siĂšcle. 3La dĂ©mographie connaĂźt le mĂȘme essor, la population passant de plus de 7000 habitants en 1870 Ă prĂšs de 10 000 dix ans plus tard pour culminer Ă 13 000 en 1910. Cette croissance s'explique par lâafflux des populations paysannes vers la ville. La certitude dây trouver un emploi Ă l'usine, alors que la vie dans des fermes souvent pauvres Ă©tait pĂ©nible, incite ces ruraux Ă migrer. Ă cette mĂȘme pĂ©riode, on recense sur la commune une dizaine de petits chantiers de construction navale qui peuvent lancer jusquâĂ une centaine de chaloupes par an. 1. La chaloupe sardiniĂšre Construction 1 Le bois dur et rĂ©sistant est dit maigre », le bois fin et tendre est dit gras ». 4La technique de construction navale appliquĂ©e par les charpentiers diffĂ©rencie les chaloupes non pontĂ©es et les plus grandes unitĂ©s, les dundees en particulier. La distinction essentielle rĂ©side dans la construction de la membrure formĂ©e de plusieurs piĂšces, maigre et gras1, qui consolident lâallonge des hauts. 5Sur les chaloupes, le premier travail consiste Ă tailler la quille Ă la longueur souhaitĂ©e. Cette piĂšce de bois est alors placĂ©e sur une toile tendue entre des tins de maniĂšre Ă pratiquer lâassemblage avec le tableau et lâĂ©trave. Ces assemblages se font par des Ă©carts Ă mi-bois renforcĂ©s par deux piĂšces de bois mort le marsouin Ă lâassemblage quille/Ă©trave et le massif Ă lâassemblage quille/tableau. Puis vient la pose des membrures au sein desquelles on distingue trois parties la varangue, le genou et lâallonge des hauts. Lâespacement entre chaque membrure est dâun pied. La varangue se fixe Ă cheval sur la quille et lâallonge des hauts y est reliĂ©e par le genou. Une fois les membrures fixĂ©es, il faut les soutenir, en cours de construction, par des Ă©pontilles en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, une Ă©pontille toutes les trois membrures. On place ensuite les trois lisses dâexĂ©cution qui servent Ă fixer les membrures, en commençant toujours par le milieu. Dâabord la lisse de prĂ©ceinte, puis la lisse de bouchain et la lisse de quille. Une fois les jambettes et les banquiĂšres ou serres installĂ©es Ă lâintĂ©rieur, on peut commencer le bordĂ©. LâĂ©querrage, pour la fixation des virures de bordĂ© se fait par le bas. La derniĂšre virure, la parclose, nâest jamais placĂ©e dans le bouchain. La grande difficultĂ© consiste Ă obtenir des coutures de bordĂ© ni trop larges ni trop Ă©troites, car cela aurait rendu plus dĂ©licat le travail des calfats. 6A lâintĂ©rieur, la quille et les varangues sont recouvertes par la carlingue qui assure ainsi la solidaritĂ© des membrures. Le dernier travail consiste Ă Ă©laborer le vaigrage, c'est-Ă -dire le bordĂ© intĂ©rieur. Auparavant, aura Ă©tĂ© assujetti lâemplanture du mĂąt, le sabot, un massif de bois creux prolongĂ© Ă bĂąbord comme Ă tribord par le grand bau ou banc central. A lâarriĂšre, Ă mi-chemin de lâĂ©tambot se trouve le banc de pompe et Ă lâavant, un autre petit banc. Tout Ă lâarriĂšre, il y avait petit un faux-pont. 7Le systĂšme de fixation du gouvernail varie selon les ports et les chantiers de construction. Un aiguillot parfois deux sur la partie haute du gouvernail correspondait Ă un fĂ©melot ou deux sur lâĂ©tambot. Le mĂȘme systĂšme de fixation est appliquĂ© sur les parties basses du gouvernail et de lâĂ©tambot. La barre, extrĂȘmement longue, est amovible. Une mortaise y est pratiquĂ©e qui capelle le sommet du gouvernail. 2 Palan composĂ© d'une poulie dans laquelle passe un cordage. Une de ses extrĂ©mitĂ©s fait dormant Ă un ... 3 Anneau mĂ©tallique autour d'un mĂąt pour faire coulisser la voile. 8Les deux mĂąts qui grĂ©ent la chaloupe sont deux mĂąts de levĂ©e le mĂąt de misaine, le plus Ă lâavant Ă©tant moins haut que le mĂąt de taillevent toujours placĂ© Ă mi-quille. Comparativement Ă la quille, le mĂąt de misaine est plus court et le mĂąt de taillevent plus long. Ce dernier Ă une inclinaison moins prononcĂ©e vers lâarriĂšre que le mĂąt de misaine. La tĂȘte de mĂąt est percĂ©e dâun trou sous le tenon que capelle lâĂ©tai dans lequel passe lâitague2. Le rocambeau3, bridĂ© sur lâitague, se termine par un crochet qui sert Ă hisser et Ă soutenir la vergue. Les calfats prennent alors leur fer pour garnir les coutures de bordĂ© dâĂ©toupe et de brai, puis la chaloupe une fois mĂątĂ©e Ă©tait lancĂ©e et dirigĂ©e vers une grĂšve pour y ĂȘtre enduite de coaltar. AmĂ©nagement 4 Les teneurs » sont les hommes de nage chargĂ©s de maintenir le bateau dans le lit du vent lors de ... 9On distingue plusieurs espaces dĂ©limitĂ©s par les bancs tout Ă lâarriĂšre, le faux-pont oĂč lâon range divers matĂ©riels Ă lâexclusion du matĂ©riel de pĂȘche. De cette petite plate-forme arriĂšre jusquâau banc de pompe se trouve le tillac câest la place rĂ©servĂ©e du barreur souvent le patron et du mousse celui-ci Ă©tant toujours prĂšs de lâhomme de barre. Du banc de pompe au banc de lâavant, lâĂ©coutille oĂč lâon distingue deux parties la partie arriĂšre jusquâau grand bau rĂ©servĂ© aux manĆuvres de pĂȘche et oĂč travaillent les gars dâĂ©coutille », et la partie avant, du grand bau au banc central, domaine des teneurs4» au cours de la pĂȘche Ă la sardine de rogue. Tout Ă l'avant, de l'Ă©trave au mĂąt de misaine il y a une amorce de pont sous lequel on range le petit matĂ©riel, principalement la graisse pour lâitague. En plus de cet amĂ©nagement Ă©trave/tab1eau, il y a une dĂ©limitation bĂąbord/tribord. Le cĂŽtĂ© bĂąbord est rĂ©servĂ© aux manĆuvres et au travail alors que toute la longueur tribord sert au stockage du matĂ©riel le mĂąt de cape, la toile, les avirons. Lors de la pĂȘche Ă la sardine de rogue, par exemple, les filets Ă©taient halĂ©s par bĂąbord et dĂ©maillĂ©s Ă tribord. 2. PĂȘches et techniques de pĂȘche 10La caractĂ©ristique des chaloupes de Douarnenez est la diversitĂ© des pĂȘches pratiquĂ©es au cours de lâannĂ©e, respectant ainsi la tradition des ports de Cornouaille. Mais les deux pĂȘches principales qui mobilisent tous les Ă©quipages sont la sardine de rogue et le maquereau de dĂ©rive. Si la premiĂšre, une pĂȘche dâĂ©tĂ©, attire bien des hommes Ă embarquer certains patrons vont jusquâĂ Crozon chercher Ă©quipage, câest aux dures pĂȘches de lâhiver que se jugent pĂȘcheurs et chaloupes. Ă ces deux pĂȘches prioritaires s'ajoutent des pĂȘches annexes telles que raie, maquereau de ligne, sprat, thon, palangres. Sans omettre la langouste en Mauritanie, Ă©galement pratiquĂ©e par les Douarnenistes, et Ă chaque pĂȘche ses techniques utilisation de filets ou de lignes, capture immĂ©diate ou diffĂ©rĂ©e du poisson, etc. Il est Ă©vident que l'apparition du moteur va rendre les pĂȘches moins pĂ©nibles et entraĂźner des variantes techniques. Le calendrier de pĂȘche des chaloupes douarnenistes peut se rĂ©sumer ainsi Janvier - mi-mars raie, sprat. Mi-mars â mi-juin maquereau de dĂ©rive. 25 juin â 10 dĂ©cembre sardine de rogue et maquereau de ligne. Mi-dĂ©cembre â janvier sardine de dĂ©rive. La sardine de rogue 5 Câest par ce terme en breton micher, fem. ar vicher que les pĂȘcheurs dĂ©signaient leur activitĂ©. 6 Le tannage, une fois lâan en gĂ©nĂ©ral, permettait de protĂ©ger les voiles qui Ă©taient en toile de lin ... 11Cette pĂȘche commence le 25 juin et se termine le 10 dĂ©cembre. Loin dâĂȘtre une pĂȘche rĂ©putĂ©e dangereuse, câest celle qui demande la technique la plus Ă©laborĂ©e. Sa prĂ©paration est minutieuse et rien n'est laissĂ© au hasard. Le mĂ©tier5 » de la sardine de rogue dure plus de six mois, et câest sur cette pĂȘche quâun Ă©quipage gagne ou perd son annĂ©e. Son importance est confirmĂ©e par le pĂšlerinage des femmes de pĂȘcheurs Ă la fontaine de Saint-Pierre entre le Coulinec et la Pointe du LeydĂ© Ă TrĂ©boul. Ces femmes portent des cierges et prient pour que la pĂȘche soit fructueuse. AprĂšs les durs mĂ©tiers de l'hiver et du printemps, maquereau de dĂ©rive en gĂ©nĂ©ral, le moment est venu de prĂ©parer lâarmement pour la sardine de rogue. Les Ă©quipages remettent les embarcations Ă neuf ; ils calfatent et coaltarent la coque et nettoient totalement lâintĂ©rieur. Les filets sont placĂ©s sous le banc de pompe Ă lâarriĂšre de la chaloupe et recouverts par une grande toile huilĂ©e qui leur assure une protection maximale contre la rosĂ©e ou la pluie. Les voiles sont tannĂ©es6 et le grĂ©ement vĂ©rifiĂ©. Pour prĂ©parer le tannage on faisait rĂ©duire la poudre ou la rĂ©sine de cachou, extraite du bois dâacacia, dans de lâeau bouillante jusquâĂ obtenir un liquide rouge-brun. On y trempait alors les voiles; c'est Ă©galement de cette façon que les pĂȘcheurs tannaient leurs vĂȘtements, vareuses et pantalons, ainsi que les filets de raie et de maquereau. Les filets de sardine Ă©taient tannĂ©s selon le mĂȘme procĂ©dĂ© mais en utilisant une poudre bleue. Câest encore une poudre diffĂ©rente, lâocre, donnant une teinte rouge, qui servait Ă tanner les voiles des thoniers. Pour la pĂȘche Ă la sardine de rogue, tout l'Ă©quipement appartient au patron la chaloupe, bien sĂ»r, les filets et surtout la rogue, dont lâachat lui incombait. Les patrons possĂ©daient une trĂšs grande quantitĂ© de filets, jusquâĂ deux cents piĂšces pour certains. Ceci sâexplique par le fait que le moule du filet variait Ă mesure que la pĂȘche sâavançait dans lâannĂ©e et donc que la sardine grossissait. 12Il existait trois types de rogue la rogue de hareng, la rogue de morue dite rogue de Bergen » ou simplement bergen » et la rogue de maquereau, considĂ©rĂ©e comme Ă©tant de qualitĂ© supĂ©rieure. Lâun de nos informateurs nous a signalĂ© que certains patrons douarnenistes utilisaient du plancton. CâĂ©tait de loin l'appĂąt 1e plus prisĂ©. Ces patrons donnaient un coup de senne quelques jours avant le dĂ©but de la pĂȘche et salaient le plancton dans des barils pour en assurer la conservation. Dâautres, plus aisĂ©s sans doute, lâachetaient directement Ă des paysannes qui le pĂȘchaient dans les mares de la cĂŽte, entre la plage du Ris et la plage de Sainte-Anne-la-Palud. 7 Les importations des pays scandinaves, en particulier la rogue norvĂ©gienne, datent du 18Ăšme siĂšcle ... 13Il est intĂ©ressant de signaler que la rogue arrivait directement de NorvĂšge7 Ă Douarnenez, ce port Ă©tant le seul assez profond pour accueillir les goĂ©lettes norvĂ©giennes l'une de ces goĂ©lettes s'est d'ailleurs Ă©chouĂ©e vers 1870 sur la plage du Ris. C'est donc Ă Douarnenez que sâapprovisionnent les pĂȘcheurs du Guilvinec, d'Audierne et d'ailleurs. Les lieux de pĂȘche, pour la sardine de rogue, sont assez nombreux. En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, la pĂȘche commençait hors de la baie et se terminait dans la baie. Les lieux les plus frĂ©quentĂ©s sont 1es parages des Tas de Pois, le Chenal de Brest, la riviĂšre » de Brest ; hors de la baie on pĂȘchait au large du Cap de la ChĂšvre. Dans la baie, i1 y avait deux lieux bien distincts la cĂŽte de Beuzec et la cĂŽte de Crozon. Encore fallait-il prendre des amers Ă terre pour trouver le lieu de pĂȘche exact. 14Ayant dĂ©cidĂ© d'aller pĂȘcher au large des Tas de Pois, le patron rĂ©unit son Ă©quipage vers quatre ou cinq heures de lâaprĂšs-midi. Il leur faut rejoindre l'anse de Penn-Hir pour ĂȘtre parĂ© dĂšs le lendemain matin. Ă bord, les hommes se relaient Ă la barre pendant que le gars dâĂ©coutille prĂ©pare la rogue pour le lendemain. Quand la chaloupe arrive dans l'anse de Penn-Hir, la rogue est prĂȘte et l'Ă©quipage a soupĂ©. Il va cabaner sur zone avant de hisser les voiles dĂšs le lever du soleil Ă la recherche du lieu de pĂȘche. La pĂȘche proprement dite commence par le choix et le grĂ©ement du filet qui, en fait, consiste Ă amarrer une pierre assez lourde Ă la corde basse du filet au bout le plus prĂšs du bateau ; cette pierre de lestage permet au filet de rester bien vertical. Ă lâextrĂ©mitĂ© de la corde basse la plus Ă©loignĂ©e de la chaloupe on amarre une pierre lĂ©gĂšre. Le moment est venu de "lancer dehors". Les grands avirons sont sortis et les teneurs de bout manĆuvrent pour diriger le bateau dans le lit du vent et surtout lây maintenir. La chaloupe progresse toujours trĂšs lentement. Le patron lance dehors et quand le filet est Ă lâeau il ne le tient plus que par le filin prolongeant la corde des liĂšges. Le filet est bien droit dans lâeau, la chaloupe bien dans le lit du vent, le patron va lancer la rogue d'un cĂŽtĂ© et de lâautre du filet. Certains patrons mĂ©langeaient cette premiĂšre rogue utilisĂ©e Ă de la farine d'arachide. Il faut maintenant attendre que la sardine lĂšve et maille. La grande difficultĂ© de cette pĂȘche est de maintenir le filet bien droit, de faire en sorte quâil ne sâincurve pas. Si tel est le cas, câest que la sardine maille du mĂȘme cĂŽtĂ© et il faut alors lancer sa rogue de lâautre cĂŽtĂ© pour que la sardine vienne s'y mailler afin de rĂ©tablir une sorte dâĂ©quilibre. Dans le mĂȘme temps, l'un des teneurs de bout doit travailler pour ramener la tĂȘte du filet vers la queue pour le remettre bien droit, tout en gardant la chaloupe dans le lit du vent. Il y a un ou parfois deux teneurs par aviron Ă lâaviron de bĂąbord le teneur est installĂ© sur le banc de lâavant quand le teneur de l'aviron de tribord est assis sur le grand bau. Le rĂŽle des teneurs est bien sĂ»r capital dans la rĂ©ussite de la pĂȘche. Pendant que la sardine maille, les gars dâĂ©coutille prĂ©parent un autre filet un filet ne reste jamais plus de vingt ou vingt-cinq minutes en pĂȘche. AprĂšs, il faut haler le filet dedans puis en mouiller un deuxiĂšme et ainsi de suite. 8 Petite voile arriĂšre qui sert plus Ă la manĆuvre quâĂ la propulsion. 15Pendant que ce dernier filet pĂȘche, les gars d'Ă©coutille dĂ©maillent le premier. Ce travail demande beaucoup d'adresse, car il ne faut jamais toucher la sardine. Afin de le faire dans les rĂšgles, il faut secouer le filet de telle sorte que la sardine tombe dâelle-mĂȘme. Lorsque la sardine maille vraiment bien, on ne prend pas le temps de haler le filet Ă bord et de dĂ©mailler immĂ©diatement. On a, dans cette circonstance, recours Ă la technique dite du filet largue », c'est-Ă -dire quâon le laisse dĂ©river. Lorsque le filet mis Ă l'eau ne peut plus pĂȘcher, il est larguĂ© et immĂ©diatement remplacĂ© par un autre. Il peut ainsi se trouver plusieurs filets larguĂ©s Ă la mer qui dĂ©rivent. On les hale Ă bord plus tard, en manĆuvrant la chaloupe Ă lâaviron, tapecul8 hissĂ©. 9 En breton ar pesk bras, thon rouge de lâAtlantique [thunnus thynnus]. 16La hantise du pĂȘcheur, câest le grand poisson9 » qui vient dans la baie vers le mois de septembre. La venue de ce prĂ©dateur autour des lieux de pĂȘche fait fuir la sardine et la marĂ©e est perdue. Les pĂȘcheurs appellent cela an trocâh la coupure. 17La pĂȘche Ă la sardine de rogue a Ă©tĂ© pratiquĂ©e Ă bord de la chaloupe jusqu'au tout dĂ©but des annĂ©es 1920. AprĂšs cette date, on a utilisĂ© une annexe, les filets et la rogue Ă©tant stockĂ©s Ă bord de la chaloupe. L'utilisation de lâannexe facilite la technique du filet largue lorsque l'annexe est en pĂȘche, la chaloupe hale Ă bord les filets en dĂ©rive. 18Cette pĂȘche, outre sa difficultĂ© technique, demande une attention de tous les instants, principalement des teneurs aux avirons et du patron. La rĂ©ussite de la pĂȘche est synonyme d'un hiver serein ; son Ă©chec entraĂźne de dures campagnes dâhiver Ă la pĂȘche aux filets de raie ou au maquereau de dĂ©rive. La sardine de dĂ©rive et le sprat 19Pour la pĂȘche Ă la sardine de dĂ©rive et au sprat, on utilise une technique assez similaire. Avant que l'usage des filets de dĂ©rive ne s'Ă©tablisse pour la pĂȘche au sprat vers 1905, les pĂȘcheurs utilisaient des sennes qui demandaient la collaboration de plusieurs chaloupes. 20A partir du 10 dĂ©cembre, date qui marque la fin de la sardine de rogue, et jusqu'Ă la mi-mars, dĂ©but du maquereau de dĂ©rive, les patrons peuvent choisir entre les trois pĂȘches d'hiver filets de raie, sardine de dĂ©rive ou sprat. Certains alternent, car le sprat ne se pĂȘche quâĂ la pleine lune. Une campagne de pĂȘche au sprat dure neuf Ă dix jours ; elle se termine toujours deux jours aprĂšs la pleine lune. Les engins utilisĂ©s sont des filets de dĂ©rive Ă flotteurs selon la profondeur, on dĂ©ploie huit brasses de flotteurs au milieu de la baie, par exemple ou quatre brasses prĂšs de la cĂŽte. La sardine de dĂ©rive est une grosse sardine, trĂšs peu prisĂ©e des conserveurs. Elle est donc destinĂ©e prioritairement aux mareyeurs. Elle se pĂȘche dans les mĂȘmes conditions que le sprat, avec la mĂȘme attention particuliĂšre Ă la lunaison. Le maquereau de ligne 10 Lâutilisation de droite » dehou pour le sud et gauche » pour le nord kleiz est remarquable ... 21Ce mĂ©tier » qui se dĂ©roule en gĂ©nĂ©ral du mois de juin aux mois de septembre/octobre, au sud de lâĂźle de Sein, dans la mer de droite10 » est pratiquĂ©e par les patrons qui n'ont pu ou voulu armer pour la sardine de rogue. Elle rĂ©clame effectivement d'assez grandes dĂ©penses achat ou prĂ©paration des filets, remise Ă neuf de la chaloupe et surtout achat de la rogue. Câest en fait une avance que fait le patron, sans ĂȘtre toujours sĂ»r, en cas d'Ă©chec, de totalement sây retrouver. Le revers de la mĂ©daille câest que si la pĂȘche au maquereau de ligne nâengage pas Ă beaucoup de frais elle assure un rapport assez modeste. Le premier travail est la prĂ©paration de l'effare. Le mousse va Ă l'usine acheter des tĂȘtes de sardines salĂ©es qui sont entassĂ©es dans des barils. En faisant route vers les lieux de pĂȘche, ces tĂȘtes de sardines mĂȘlĂ©es Ă un peu de vieille rogue et Ă de lâeau sont pilĂ©es et broyĂ©es jusqu'Ă obtenir une pĂąte Ă©paisse et grasse. Plus tard, vers 1910, le pilon disparaĂźtra pour faire place Ă la moulinette ». 11 Du breton boued masc., nourriture. Lâeffare se dit ar stronk masc. et lâappĂąt bouedenn / ar vou ... 22La pĂȘche au maquereau de ligne se pratique au mouillage, la chaloupe Ă©tant placĂ©e en travers du courant. On boĂ«tte11 directement Ă l'aide d'une cuillĂšre de bois, l'effare servant Ă faire monter le maquereau. Chaque homme dispose dâune ligne de crin qu'il boĂ«tte avec un morceau de maquereau. Quand la pĂȘche est bonne, le pĂȘcheur file sa ligne, il ferre, la retire, dĂ©ferre le poisson, Ăšche son hameçon et file sa ligne Ă nouveau⊠Le maquereau de dĂ©rive 23Pour pratiquer cette pĂȘche, les chaloupes partent au Guilvinec. Les lieux de pĂȘche se trouvent Ă une heure, deux heures de route du Guilvinec. Puis, vers 1896, les chaloupes ont commencĂ© Ă pĂȘcher plus Ă lâouest, au sud ouest de la Pointe du Raz, et cela pendant une dizaine d'annĂ©es. La pĂȘche sâest encore dĂ©placĂ©e pour remonter vers lâouest du phare dâAr Men, la mer dâIroise ensuite, et Ouessant. Le fait que Le Guilvinec devienne pendant quelque temps le port d'attache des chaloupes douarnenistes entraĂźne des allĂ©es et venues des femmes de pĂȘcheurs. Chaque semaine elles sâen vont au Guilvinec en chars-Ă -banc porter vĂȘtements et victuailles et rentrent ⊠avec l'argent de la vente ! 24On utilise des filets de dĂ©rive ayant en gĂ©nĂ©ral cinquante mailles de profondeur. Le nombre des filets embarquĂ©s par chaque homme est variable il est de huit Ă dix Ă Douarnenez avant la Grande Guerre, et de six aprĂšs. L'Ă©quipage dâune chaloupe est composĂ© de sept Ă dix hommes plus le mousse avant la guerre. Il a ensuite augmentĂ© jusquâĂ atteindre quatorze, puis dix-huit et parfois vingt hommes. Câest encore la solidaritĂ© entre pĂȘcheurs qui sâexprime le fait dâembarquer plus d'Ă©quipiers avec moins de filets par tĂȘte permet Ă un plus grand nombre de gagner leur vie. Autre marque de solidaritĂ© les filets sur demi-part. Une veuve de pĂȘcheur peut embarquer des filets qui lui rapportent une demi-part, lâautre demi-part revenant Ă un membre de lâĂ©quipage embarquĂ© sans filets. Cette pratique, presque exclusivement rĂ©servĂ©e aux veuves, nâest appliquĂ©e que pour la pĂȘche au maquereau de dĂ©rive. Il arrive toutefois que d'anciens pĂȘcheurs embarquent aussi des filets sur demi-part sur la chaloupe d'un fils ou d'un proche parent. 12 Ensemble de filets maillĂ©s bout Ă bout. 25Le matin du dĂ©part, câest la prĂ©paration des filets. Chaque homme dâĂ©quipage vient sur le port avec son lot de filets quâil va lester Ă l'aide de filins et de galets. Vient ensuite lâopĂ©ration qui consiste Ă amarrer les filets pour former la tessure12 selon le nombre de filets, on choisit deux, trois ou quatre tessures si les filets sont vraiment nombreux. Si lâĂ©quipage est composĂ© de seize hommes ayant chacun un lot de six filets quatre-vingt seize filets au total on peut choisir de composer deux ou trois tessures. Dans le premier cas il y aura quarante-huit filets dans la tessure, trois filets par homme, et dans le second cas nous aurons une tessure de trente-deux filets, deux engins par homme. La disposition des engins dans la construction de lâensemble fait quâun mĂȘme pĂȘcheur ne peut avoir deux de ses filets amarrĂ©s bout Ă bout. On tient Ă©galement compte de la qualitĂ© du filet sâil est vieux et usagĂ©, il est l'un des premiers Ă ĂȘtre mis Ă l'eau et le contraire s'il est neuf. Mais l'Ăąge des pĂȘcheurs est aussi un critĂšre les filets des anciens font toujours partie du premier lot; ils sont placĂ©s dans la tessure de façon Ă ĂȘtre rĂ©cupĂ©rĂ©s les premiers en cas de coup dur. 26Le choix du lieu de pĂȘche incombe au patron. Il choisira une mer grasse, une mer de couleur un peu jaune comme la boue, jamais une mer bleue et claire ». Les filets sont mis Ă lâeau le soir, par vent arriĂšre. Ils dĂ©riveront ainsi toute la nuit surveillĂ©s de la chaloupe par lâĂ©quipage qui sâest organisĂ© en quarts. A l'aube le filet sera tirĂ© dedans par le bout sous le vent, et si la pĂȘche a Ă©tĂ© vraiment bonne on dĂ©maille encore Ă l'approche du port pour la vente. Les filets de raie 27Le mĂ©tier des filets de raie », pratiquĂ© uniquement en hiver en attendant la saison du maquereau de dĂ©rive, est d'un assez faible rapport. La saison et les lieux de son exercice, chaussĂ©e de Sein ou au large du phare dâAr Men câest lâĂźle de Sein qui servait de port d'attache aux chaloupes, en font une pĂȘche dangereuse qui demande une connaissance parfaite de la navigation et de la configuration de lâespace maritime local. La technique est comparable Ă celle employĂ©e pour la pĂȘche du maquereau de dĂ©rive en ce sens que lâon applique Ă©galement le systĂšme des filets maillĂ©es bout Ă bout. Ils sont mouillĂ©s puis relevĂ©s deux ou trois jours plus tard. Câest une pĂȘche qui ne se dĂ©roule que pendant les mortes eaux, les vives eaux prĂ©sentant trop de dangers pour les engins. Lorsque la pĂȘche est trĂšs bonne, certains patrons en viennent Ă faire une ou plusieurs tessures supplĂ©mentaires. Un Ă©quipage ayant commencĂ© la pĂȘche avec seize filets par homme peut ainsi la terminer avec vingt-cinq selon le nombre de tessures complĂ©mentaires. 3. Vente du poisson et rĂ©partition des gains 28Douarnenez, le plus grand port sardinier breton avec Concarneau, compte prĂšs de trente conserveries. Les usiniers 1es bourgeois », comme on avait coutume de les nommer localement dĂ©pĂȘchent des commises pour l'achat du poisson. Elles se tiennent au bout du mĂŽle, attendant l'arrivĂ©e des chaloupes. DĂšs que la premiĂšre s'approche de la jetĂ©e, les commises interpellent les patrons pour essayer de conclure un marchĂ© Douze francs chez BĂ©ziers ! ». 29 Douze francs vingt-cinq chez Poriel ! » Comme pour une vente aux enchĂšres, parmi les cris et parfois les insultes, les prix montent jusqu'Ă la conclusion du marchĂ©. La mĂ©thode de vente favorise bien sĂ»r une chaloupe se prĂ©sentant bien avant les autres Ă lâentrĂ©e du port. Mais au cours de ces marchandages, les prix ne sont pas toujours Ă la hausse. Lorsque l'usinier estime avoir assez de poisson et quâil en arrive encore, l'ordre est Ă la baisse; les commises ne sont plus aussi bavardes... Le patron-pĂȘcheur prĂ©fĂšre donc conclure un mauvais marchĂ© au plus vite plutĂŽt que de perdre sa pĂȘche. Mais le plus terrible pour les marins câest la boule noire », un panier rond entourĂ© d'un drap noir qui est placĂ© sur le toit de la conserverie. Il indique que celle-ci nâest pas acheteuse. Il arrivait, parfois, que les ouvriĂšres, harassĂ©es par le travail, placent elles-mĂȘmes la boule noire⊠30Trois systĂšmes de vente Ă©taient en vigueur Ă Douarnenez. La sardine 31Le marchĂ© Ă©tant a priori conclu, le patron connaĂźt son acheteur et le prix de vente de sa pĂȘche en arrivant au mouillage. DĂšs que la chaloupe est bout Ă terre, le patron prĂ©pare deux paniers qu'il trempe plusieurs fois dans l'eau pour bien laver la sardine. Il va alors les prĂ©senter Ă lâacheteur afin de conclure dĂ©finitivement le marchĂ©. Ceci Ă©tant fait, le comptage et le transport s'organisent. 32Ă Douarnenez, la sardine se vend au mille juste, alors qu'ailleurs Audierne ou Camaret par exemple on applique le systĂšme du "grand" mille. La sardine est comptĂ©e par main »; la main Ă©quivaut Ă cinq sardines. Les paniers servant au transport contiennent chacun deux cents sardines cent ou cent cinquante lorsqu'elle est rare ; il faut donc quarante mains » pour emplir un panier. Chaque homme d'Ă©quipage en transporte deux Ă la fois jusquâĂ la conserverie oĂč on lui remet un jeton de plomb qui servira Ă faire le total de la sardine vendue. Le systĂšme en vigueur est donc le suivant une main = 5 sardines 40 mains = 1 panier = 200 sardines 2 paniers 400 sardines = 1 jeton 5 paniers 1000 sardines = le mille juste » 33Dans les ports oĂč sâapplique le grand » mille, le comptage se pratique comme suit quarante mains de cinq sardines plus une sardine par main servant de tĂ©moin » - le panier de deux cents sardines en contient donc deux cent quarante et le grand » mille totalise mille deux cents sardines. En rĂ©alitĂ©, le grand mille variait selon les ports entre mille cinquante et mille deux cent cinquante sardines. Le systĂšme est donc le suivant une main = 5 sardines + 1 le tĂ©moin » 40 mains = 1 panier 240 sardines 2 paniers 480 sardines = 1 jeton 5 paniers 1200 sardines = le grand » mille 34On comprend qu'avec un tel systĂšme le conserveur sâoffre » deux cents sardines supplĂ©mentaires par mille »⊠35Pour cette pĂȘche, le partage des gains se fait une fois par semaine. La paie a lieu le samedi en fin de journĂ©e ou le dimanche matin chez le patron ou dans un bistrot. Le patron, qui a Ă©changĂ© ses jetons contre un bon payable en espĂšces, dispose 1'argent sur la table afin de procĂ©der Ă sa rĂ©partition. La moitiĂ© des gains lui revient il a fourni lâembarcation, les filets et la rogue. L'autre moitiĂ© est partagĂ©e entre les membres de l'Ă©quipage, le patron compris. Le maquereau 13 Ce maquereau supplĂ©mentaire se dit an tal masc.. 36Une fois le marchĂ© conclu entre la commise et le patron-pĂȘcheur et la qualitĂ© du poisson vĂ©rifiĂ©e, le comptage s'organise. Le maquereau est vendu Ă la douzaine, treize Ă la douzaine » dans les faits, car pour chaque douzaine comptĂ©e il faut dĂ©poser un maquereau13 tĂ©moin » dans un panier rĂ©servĂ© Ă cet usage. Pour connaĂźtre le nombre de poissons il suffit de compter les tĂ©moins ». Lâusinier achetait donc douze maquereaux quand le marin en donnait treize. Ă Brest, le systĂšme nâest pas plus Ă©quitable on y vend au cent mais il faut 108 maquereaux pour atteindre la centaine ! 37Pour la pĂȘche au maquereau, le systĂšme de rĂ©partition des gains Ă©tait diffĂ©rent de celui de la pĂȘche Ă la sardine. Cela provient essentiellement du fait que lâeffare coĂ»te beaucoup moins cher que la rogue et que chaque homme dâĂ©quipage apporte ses propres filets. Le patron dispose d'une ou parfois deux parts pour le bateau et le reste est partagĂ© entre tous les hommes. 38Ă bord dâune chaloupe pĂȘchant pour deux parts avec huit hommes patron compris les gains sont partagĂ©s en dix. Trois parts reviennent au patron deux pour la chaloupe et une pour sa pĂȘche et une part Ă chacun des sept autres hommes. La rĂ©partition des gains se fait, pour toutes les pĂȘches d'hiver, Ă la fin de la marĂ©e c'est-Ă -dire tous les quinze jours. Le thon 39La mĂ©thode appliquĂ©e Ă la vente du thon Ă©tait aussi compliquĂ©e qu'arbitraire ; le thon Ă©tĂȘtĂ© et vidĂ© est vendu Ă la douzaine, mais une douzaine » Ă©tablie selon deux critĂšres bien prĂ©cis le poids et l'unitĂ©. La barre est fixĂ©e Ă cinq kilos. Tout thon pesant plus de cinq kilos est considĂ©rĂ© comme une unitĂ©, et il suffit, en toute logique, de douze unitĂ©s pour faire une douzaine. En revanche, il faut deux thons de moins de cinq kilos pour faire une unitĂ©. On en arrive ainsi Ă obtenir des douzaines » qui comprennent vingt-quatre thons sâils pĂšsent tous moins de cinq kilos. Parfois, pour un thon qui est juste au-dessous de la barre fatidique, il suffit dâajouter une piĂšce de deux sous et le poisson est immĂ©diatement considĂ©rĂ© comme pesant cinq kilos. Ce systĂšme de vente Ă la douzaine » a Ă©tĂ© appliquĂ© Ă Douarnenez jusqu'Ă la deuxiĂšme guerre mondiale. 40Ces trois systĂšmes de vente sardine, maquereau, thon, diffĂ©rents dans leur fonctionnement, ont cependant une base commune lâexploitation du pĂȘcheur. Celui-ci est pourtant bien conscient de cet Ă©tat de fait tous ces systĂšmes servaient Ă voler le marin » nous a dĂ©clarĂ© une de nos sources. Ces patrons dâusine, il ne leur a pas Ă©tĂ© difficile de faire fortune ! ». La conscience de cette exploitation ajoutĂ©e aux Ă©checs relatifs des mouvements de lutte, ont eu pour effet de dĂ©velopper la solidaritĂ© entre les pĂȘcheurs et les ouvriĂšres dâusine. 4. Les conserveries 41Les conserveries embauchent surtout un personnel fĂ©minin sans aucune formation, sous-payĂ©. L'Ăąge lĂ©gal est fixĂ© Ă treize ans mais les patrons nâhĂ©sitent pas Ă employer, sous de faux noms, des fillettes ĂągĂ©es de dix, onze ou douze ans pendant les vacances scolaires principalement, pour travailler la sardine de rogue. Et les journĂ©es sont longues, Ă©prouvantes, harassantes⊠42La fabrication des conserves de sardines Ă l'huile se dĂ©compose en cinq phases principales lâĂ©tĂȘtage les sardines, disposĂ©es sur de grandes tables sont salĂ©es, Ă©tĂȘtĂ©es et vidĂ©es avant dâĂȘtre chargĂ©es dans des paniers. Elles sont ensuite trempĂ©es quelques instants dans une saumure, puis lavĂ©es. le sĂ©chage et la friture dĂšs quâelles sont lavĂ©es, les sardines sont mises Ă sĂ©cher sur des grils. Le sĂ©chage se fait en gĂ©nĂ©ral en plein air. lâemboĂźtage les sardines sont disposĂ©es manuellement une Ă une dans la boĂźte. Celle-ci, une fois pleine, est emplie dâhuile. la soudure câest le travail des hommes de lâatelier de soudure. la bouillote » les boĂźtes sont stĂ©rilisĂ©es par Ă©bullition pendant prĂšs dâune heure puis vĂ©rifiĂ©es. 43Les travaux considĂ©rĂ©s comme dĂ©licats, Ă©tĂȘtage et emboĂźtage par exemple, sont rĂ©servĂ©es Ă des femmes originaires de Douarnenez. Les autres travaux, moins prisĂ©s des Douarnenistes, comme le transport des sardines dâun atelier Ă l'autre 1a corvĂ©e » sont dĂ©volus aux femmes originaires des campagnes avoisinantes. 14 Ce sera cinq rĂ©aux ! » Câest lâancien systĂšme qui avait cours lur livre, real id., gwenneg ... 44Les gains sont modestes jusquâen 1904, les ouvriĂšres sont payĂ©es au mille », câest-Ă -dire au nombre de poissons travaillĂ©s. Comme il Ă©tait impossible Ă lâouvriĂšre de comptabiliser prĂ©cisĂ©ment le nombre de poissons travaillĂ©s, la contremaĂźtresse ou commise » donnait un chiffre au hasard, faisant souvent entrer des considĂ©rations et critĂšres personnels pour dĂ©finir son choix. En 1904, donc, se dĂ©roule la premiĂšre grĂšve qui permet aux ouvriĂšres dâobtenir une rĂ©munĂ©ration horaire. Puis, en 1907 suite Ă une nouvelle grĂšve, elles obtiennent deux sous de l'heure la premiĂšre annĂ©e de leur embauche, trois sous de lâheure au cours des deux annĂ©es suivantes, puis quatre sous de l'heure ensuite. Une autre grande grĂšve sera menĂ©e pour obtenir vingt-cinq sous de l'heure, en 1924 les 2 000 sardiniĂšres arrĂȘtent le travail et marchent dans les rues de Douarnenez en reprenant le slogan breton Pemp real a vo !14 » . Les commises sont acheteuses et/ou contremaĂźtresses. Issues, comme les ouvriĂšres, du milieu maritime local, elles nâen prennent pas moins le parti du patron lors des grĂšves. Ătre commise, Ă cette Ă©poque, c'Ă©tait l'assurance d'avoir son pain quotidien », nous a dĂ©clarĂ© une ancienne ouvriĂšre dâusine. Prendre le parti des ouvriĂšres au cours dâun conflit, c'Ă©tait lâassurance de se retrouver sans emploi du jour au lendemain. Vers 1907-1908, une commise gagne environ six cents francs par an, rĂ©glĂ©s le trente et un dĂ©cembre. Les usines emploient une majoritĂ© d'ouvriĂšres, mais il existe au moins un mĂ©tier masculin celui de soudeur. Ce travail consiste Ă assembler par soudure les boĂźtes de conserve vides, puis Ă sertir le couvercle une fois pleines. Ă une certaine Ă©poque, les pĂȘcheurs qui ne pratiquaient pas les mĂ©tiers d'hiver » Ă©taient embauchĂ©s comme soudeurs ils Ă©taient soudeurs en hiver et pĂȘcheurs en Ă©tĂ©. 5- Les passeurs et les mousses 45Il existait deux autres activitĂ©s essentielles quâil faut rappeler passeur et mousse. Les passeurs possĂ©daient chacun un canot dâune douzaine de pieds de quille. Leur mĂ©tier consistait Ă faire la navette entre les quais et les chaloupes afin de transporter Ă©quipages et matĂ©riel de pĂȘche. Cette fonction avait deux caractĂ©ristiques elle permettait d'abord Ă des hommes qui se trouvaient dans lâimpossibilitĂ© d'aller en mer d'avoir un emploi et elle Ă©vitait au patron-pĂȘcheur lâachat d'une annexe. Au cours de nos enquĂȘtes, le chiffre de douze passeurs nous a Ă©tĂ© donnĂ© pour le seul port de Douarnenez avant la Grande Guerre. Chaque passeur avait son emplacement et ses Ă©quipages attitrĂ©s. Il Ă©tait rĂ©munĂ©rĂ© de deux façons diffĂ©rentes pendant les mĂ©tiers » d'Ă©tĂ©, chaque chaloupe versait cent sous par semaine au passeur, et donc, mĂȘme en cas dâĂ©loignement prolongĂ© une campagne de pĂȘche au large dâĂtel ou de Quiberon, par exemple, il Ă©tait payĂ© au retour de la chaloupe pour le nombre de semaines dâabsence. CâĂ©tait une forme Ă©lĂ©mentaire de congĂ©s payĂ©s ! En hiver, le passeur Ă©tait payĂ© sur la part du bateau tous les quinze jours. 46Son vĂ©ritable apprentissage, le marin-pĂȘcheur le faisait comme mousse ce gamin embarquait parfois Ă lâĂąge de neuf ans, mais ce nâest qu'Ă treize ans qu'il pouvait ĂȘtre inscrit au rĂŽle, l'obtention du certificat d'Ă©tudes primaire en Ă©tant la raison. Certains tĂ©moignages ou rĂ©cits selon lesquels le mousse Ă©tait maltraitĂ© Ă bord n'ont pas Ă©tĂ© attestĂ©s au cours de nos entretiens. Il faut cependant signaler que nos informateurs ont tous fait leur apprentissage Ă bord de chaloupes appartenant Ă leur pĂšre ou Ă un proche parent. Ses tĂąches principales du mousse Ă©taient la propretĂ© du bateau et lâĂ©tĂȘtage de la sardine pour la prĂ©paration du souper Ă bord. Lorsque la chaloupe fait route pĂȘche, il se trouve toujours auprĂšs du barreur. Lâapprentissage du mousse durait quatre ans ; les trois premiĂšres annĂ©es, il gagnait une demi-part, la quatriĂšme annĂ©e, trois-quarts de part. Ce nâest quâĂ partir de la cinquiĂšme annĂ©e quâil percevait une part entiĂšre. 15 DZ 194, Notre Dame de Bon Voyage, chaloupe immatriculĂ©e en 1897, dĂ©sarmĂ©e en 1905. Patron Guillau ... 47Selon lâun de nos informateur, câest en 1897, sur la chaloupe immatriculĂ©e DZ 19415 appartenant Ă lâun de ses oncles, que sâest Ă©tablie Ă Douarnenez la pratique du mousse Ă terre ». Ce gamin, inscrit au rĂŽle, ne participait qu'Ă la pĂȘche de la sardine de rogue, et restait donc Ă terre le reste de lâannĂ©e. La prioritĂ© accordĂ©e aux orphelins Ă lâinscription comme mousse devint la rĂšgle pour engager le mousse Ă terre ». 48En ville, la vie est rythmĂ©e par les diverses activitĂ©s liĂ©es Ă la pĂȘche et le travail Ă la conserverie. Les retours de pĂȘche provoquent une animation fĂ©brile sur le port, entre les enchĂšres des commises et le va-et-vient des pĂȘcheurs transportant les paniers de poissons de la chaloupe Ă 1'usine oĂč les ouvriĂšres, extĂ©nuĂ©es, trouvent encore le cĆur de chanter. Mais derriĂšre cette bouillonnante vie portuaire se profile dĂšs le tout dĂ©but de ce 20Ăš siĂšcle une grave crise Ă©conomique aux causes multiples. La premiĂšre est la dĂ©sertion du poisson dâargent » la sardine sâĂ©loigne peu Ă peu des cĂŽtes bretonnes ; elle ne reviendra plus. Dans le mĂȘme temps, la mĂ©canisation sâinstalle dans les usines achats de sertisseuses qui mettent les soudeurs au chĂŽmage, par exemple ; la motorisation des navires au dĂ©but des annĂ©es 1920 va rendre obsolĂštes les chaloupes traditionnelles Ă voile et toutes les techniques de pĂȘche qui y sont liĂ©es. Un nouveau type de bateau polyvalent mu par un puissant moteur, le malamok, va apparaĂźtre avec de nouvelles techniques et des lieux de pĂȘche plus lointains. Le sous-dĂ©veloppement de la rĂ©gion en infrastructures, le transport ferroviaire en particulier, est aussi un facteur aggravant. Si la crĂ©ation de la liaison entre Douarnenez et Quimper en 1884 a un temps facilitĂ© le transport des marchandises et l'implantation de nouvelles usines, le refus des compagnies dâaccorder des tarifs prĂ©fĂ©rentiels pour le transport du poisson puis celui d'assurer le transport de la sardine fraĂźche sâavĂšrent ĂȘtre des dĂ©cisions rĂ©dhibitoires. DĂšs les annĂ©es 1908-1909, il y a de nombreuses grĂšves, les pĂȘcheurs nâarrivant plus Ă Ă©couler le produit de la surpĂȘche et la conserverie, qui jusque lĂ Ă©tait le seul dĂ©bouchĂ©, ne pouvant bientĂŽt plus assurer son rĂŽle. 49Les longues luttes et Ăąpres conflits sont le point d'orgue de la solidaritĂ© dans le monde maritime douarneniste ils caractĂ©riseront longtemps lâidentitĂ© de la ville trĂšs marquĂ©e par un engagement Ă lâextrĂȘme gauche anarcho-syndicalisme vigoureux, Ă©lection de lâun des premiers maires communistes de France SĂ©bastien Velly en 1921, Ă©lection dâune femme JosĂ©phine Pencalet au conseil municipal en 1925, grandes grĂšves des pĂȘcheurs et des ouvriĂšres dâusine. Les grandes crises sardiniĂšres vont contribuer Ă bouleverser durablement toute l'Ă©conomie de la rĂ©gion. La pĂ©nurie sâenracine, la famine rĂŽde, le dĂ©clin sâinstalleâŠ
1 Dans un grand saladier, commencez cette recette de crevettes pimentĂ©es Ă la plancha en mĂ©langeant lâhuile dâolive avec le jus de 3 citrons verts, le paprika et les gousses dâail pressĂ©es. Salez et poivrez. 2. Coupez les piments dans la longueur et enlevez les graines. Hachez finement les piments et ajoutez-les Ă la marinade.
Barbecue - Plancha 25 Juillet 2013 RĂ©digĂ© par les plaisirs de la bouche et publiĂ© depuis Overblog IngrĂ©dients huile dâolive Jus de citron Sel,poivre PrĂ©paration Nettoyez les sardines en les vidant ,grattez avec votre pouce vers la colonne pour lâattraper et tirer la Rincez les et essuyer les DĂ©posez les filets dans un plat Arroser dâhuile et de jus de citron,salez et poivrer Laissez les macĂ©rĂ©es minimum 30 min Faites les cuire Ă votre convenance sur une plancha *Compter 100 Ă 150 g par personne Partager cet article Pour ĂȘtre informĂ© des derniers articles, inscrivez vous
Farcirles sardines avec la tapenade verte, puis rĂ©server. Emincer finement le fenouil, puis le faire suer avec un peu d'huile d'olives quelques minutes. Confectionner les samoussas en incorporant le fenouil et la concassĂ©e de tomates confites. Cuire en mĂȘme temps sur la plancha bien chaude les sardines et les samoussas avec un filet d'huile.
Pour 4 personnes IngrĂ©dients 500g de filets de sardines2 gousses dâail4 cĂ s dâhuile dâoliveSel, poivre Cuisson des sardines Dans un saladier, mĂ©langez lâhuile dâolive, lâail pressĂ©, les herbes, du sel et du poivre. DĂ©posez les sardines dans le saladier, retournez-les bien dans le jus. Couvrez et laissez mariner au frais pendant 1 heure. Pour la cuisson, huilez la plancha et faites-la chauffer Ă 180 °C. Faites cuire les sardines pendant 10 minutes en les retournant. Fiche recette Ă imprimerTĂ©lĂ©charger la fiche recette Ăpinglez la recette đ Retrouvez les recettes de Produits sur Pinterest.
Préparation Videz et écaillez les sardines. Mettez-les a mariner dans un plat creux, avec gros sel, mélange d herbes séchées, 3 cas d huile d olive. Filmez, mettre au frais une heure. Allumez la plancha ou mettre une grande
Banques Et Compagnie D'assurance MultimĂ©dia Et ĂlectromĂ©nager Tous les magasinsHome»Atac catalogue»Filet De Sardine Hyper-SupermarchĂ©s cataloguesFilet De SardineVoir l'offre filet de sardine dans le catalogue valable du 10/08/2022 au 15/08/2022 ExpirĂ©Catalogue Atac actuel Catalogue Atac Valable pour 4 jours Valable Ă partir de 24/08/2022 au 29/08/2022 > Voir le cataloguefiletsardine Atac cataloguesAbonnez-vous Ă notre newsletter et restez toujours informĂ© des derniĂšres brochures et offres de populaires Offres connexes actuelles Valable jusqu'au 28/08/2022 Valable jusqu'au 28/08/2022 Valable jusqu'au 18/09/2022 Valable jusqu'au 18/09/2022 Valable jusqu'au 17/09/2022 Valable jusqu'au 17/09/2022 Valable jusqu'au 17/09/2022 Valable jusqu'au 17/09/2022 Offres connexes expirĂ©es Valable jusqu'au 23/01/2022 ExpirĂ©Filet De Morue SalĂ©e, Filet De Haddock FumĂ©, Filet De Maquereau FumĂ©, Bouffis, Joue De Morue SalĂ©e Avec Os, PavĂ© De Saumon FumĂ© Ă Chaudsaumon, fumĂ©, filet, morue, pavĂ©, chaud, salĂ©e, haddock, joue, maquereau, bouffis Valable jusqu'au 22/01/2022 ExpirĂ© Valable jusqu'au 03/04/2021 ExpirĂ© Valable jusqu'au 03/04/2021 ExpirĂ© Valable jusqu'au 13/02/2021 ExpirĂ© Valable jusqu'au 17/01/2021 ExpirĂ©Porc Longe EntiĂšre DĂ©coupĂ©e Sans Filet Mignon, Porc Jambon Entier Avec Os, Porc Filet, Porc Filet Mignon, Porc CĂŽte, Porc Poitrine Avec Osjambon, filet, porc, mignon, poitrine, cĂŽte, longe, entier, entiĂšre, dĂ©coupĂ©e Valable jusqu'au 17/01/2021 ExpirĂ© Valable jusqu'au 19/09/2020 ExpirĂ©Plus d'offres de Atac Valable jusqu'au 29/08/2022 Valable jusqu'au 29/08/2022 Valable jusqu'au 29/08/2022 Abonnez-vous Ă notre newsletter et restez toujours informĂ© des derniĂšres brochures et offres de Atac.
Filetsde sardines à la sauce tomate 26% et aux petits légumes 9%. Ingrédients / Composition. Ingrédients Filets de SARDINES (Sardina Pilchardus) 65%, eau, double concentré de tomate 8%, courgette en cubes 6%, oignon en cubes 3%, vinaigre d'alcool, sel, sucre, amidon modifié de maïs, plantes aromatiques déshydratées (oignon, ail, basilic), arÎme naturel. sans huile. Valeurs
Pendant trĂšs longtemps le port de Saint Gilles Croix de Vie a Ă©tĂ© le port Français de la pĂȘche Ă la sardine. Il en subsiste aujourdâhui une conserverie encore en activitĂ©. Jâai achetĂ© sur le marchĂ© de belles sardines pĂȘchĂ©es du jour. Facile Ă vider avec des ciseaux on incise le ventre, on coupe le tĂȘte par le dos et on vide ainsi la cavitĂ© abdominale facilement. La cuisson Ă la plancha est trĂšs rapide et ne prĂ©sente aucune difficultĂ©. En lĂ©gume tout simplement des petites pommes de terre en robe des champs de lâIle voisine de Noirmoutier. A la plancha, poĂȘle anti adhĂ©sive, teppanyaki. DifficultĂ©s * coĂ»t * PrĂ©paration 10 minutes, Marinade aucune, Cuisson finale 5 minutes. Mon marchĂ© pour 4 personnes 24 Ă 30 sardines Thym Romarin Laurier 5 cl dâhuile dâolive Gros sel de Noirmoutiers 4 cl de vinaigre condimentĂ© Basque Xipister Un ou deux citrons facultatif LĂ©gumes Des pommes de terre de Noirmoutiers cuites Ă lâeau Beurre Ă la fleur de sel Pour la soif Du gros plan Nantais Laver sĂ©cher les sardines vidĂ©es Chauffer la plancha, la huiler. disposer un lit dâherbes Disposer les sardines sur les herbes, laisser griller 2 Ă 3 minutes Retourner laisser griller encore 2 minutes Parsemer de gros sel de Noirmoutier DĂ©glacer avec un filet de vinaigre condimentĂ© Basque Servir avec des citrons et un bon gros plan nantais bien frais. Une version de la recette en VidĂ©o sur YouTube Chefounet TV Abonnez vous sur YouTube pour ĂȘtre informĂ© avant tout le monde de la parution de nouvelles recettes Ă la plancha en vidĂ©osâŠ. Le soleil ne se couche jamais sur Chefounet TV.
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filet de sardine Ă la plancha